Évangile selon Jean 18, 33-38

Jésus devant Pilate, premier entretien (1886, James TISSOT)
Jésus devant Pilate, premier entretien

(1886, James TISSOT)
Culte du dimanche 22 novembre 2009
Temples Réformés de JOUY-EN-JOSAS et VIROFLAY (78)

Lire le texte biblique : Jean 18, 33-38

Prédication :
Ce passage que nous venons de lire dans l'Évangile de Jésus-Christ selon Jean, est par tradition simplement titré « Jésus devant Pilate ». Cet épisode du récit de la Passion du Christ est assez surprenant sur la forme, car son déroulement ne permet pas de déterminer spontanément, la nature de cette rencontre entre Jésus et le gouverneur romain Ponce Pilate : est-ce une comparution ? Un interrogatoire ? Une confrontation ? Une controverse ?

Contrairement à ce que pourrait attendre le lecteur de l’Évangile, cette rencontre a presque la forme d’un simple dialogue, au cours duquel les deux protagonistes se parlent sans agressivité. Étonnamment, Pilate ne porte aucune accusation envers Jésus, il ne fait que poser des questions : « Es-tu le roi des Juifs ? », « Moi, suis-je donc Juif ? », « qu'as-tu fait ? », « Tu es donc roi ? », « Qu'est-ce que la vérité ? ».

Chose plus surprenant encore, lorsque Pilate questionne Jésus, cela l'amène aussi à se questionner lui-même. Et pour nous, lecteurs de l’Évangile, ce dialogue suscite un véritable questionnement. Oui, un questionnement dont l’enjeu principal peut se résumer en deux mots : « royauté » et « vérité ».

Dès le début de la rencontre, il est question de « royauté », car c’est la principale préoccupation de Pilate. En effet, Pilate est gouverneur et procurateur de Judée, il y est le représentant de l’état romain et de son empereur César. Il est responsable d’un royaume et doit en assurer la paix publique. Cela explique pourquoi il pose directement cette première question à Jésus : « Es-tu le roi des Juifs ? ». Pilate veut connaître les intentions de Jésus, plus précisément ses intentions politiques. Car il considère Jésus comme un rival potentiel, un fauteur de troubles de l’ordre public, qui revendiquerait le même royaume que le sien, le royaume de Judée et donc celui des juifs.

Mais Jésus répond à son interlocuteur romain qu’il ne s’agit pas du même royaume : Jésus, lui, parle d’un royaume qui « n’est pas de ce monde », un royaume qui « n’est pas d’ici-bas » : il s’agit du royaume à venir, ce royaume que nous décrit le prophète Daniel dans son récit de sa vision nocturne. En somme, il nous parle du royaume de Dieu.

A cette réponse de Jésus, Pilate change sa façon de le questionner, en lui demandant « Tu es donc roi ? » ou plutôt devrait-on traduire littéralement « N’est-ce pas que tu es roi ? ». Ce n’est qu’une supposition, mais dans cette question quasi affirmative, peut-être Pilate reconnaît-il du bout des lèvres la « royauté religieuse » de Jésus. Difficile à dire. Et à ce moment précis du dialogue, jésus renverse définitivement la situation, en répondant de manière audacieuse à son geôlier romain : « Tu le dis : je suis roi. ». Jésus se garde bien de proclamer lui-même sa royauté, car cette royauté ne lui vient pas des hommes, ce n’est pas une royauté humaine comme celle de Ponce Pilate. La royauté de Jésus est une royauté divine, car elle lui est donnée par son Père, le SEIGNEUR, l’Eternel.

Aussi, cette royauté de Dieu n’a pas pour objet d’être proclamée, mais elle doit être confessée, oui, confessée par ces personnes que Jésus croise sur son chemin, confessée par ces personnes qui changent de comportement à sa rencontre, confessée par ces personnes qui sont appelées à se convertir au nom de Jésus le Christ.

Sûrement, cette phrase de Pilate nous est aussi adressée, elle ne peut nous laisser indifférent, elle concerne chacun de nous. Car la royauté de Dieu ne relève pas d’un monde isolé et clôt, au contraire, la royauté de Dieu est destinée par essence à s’adresser au monde entier, et de ce fait, elle interpelle chacun d’entre nous. Ainsi, dans ce passage de l’Evangile selon Jean, Jésus nous révèle non seulement sa royauté divine, mais aussi le sens de sa propre existence, elle aussi divine. Il nous dit : « [...] je suis né et [...] je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité ».

Alors Pilate répond à cette révélation de Jésus, non par une question, mais par un questionnement : « Qu'est-ce que la vérité ? » ; un questionnement par lequel Pilate met fin à cet étrange dialogue entre lui et Jésus ; un questionnement qui n’a hélas pas de réponse dans ce texte.

« Qu’est-ce que la vérité ? » Mais de quelle vérité s’agit-il ? Jésus et Pilate parlent-ils de la même vérité ? D’ailleurs, plusieurs vérités nous sont présentées dans ce chapitre de l’Evangile selon Jean :

La première vérité qui nous est présentée, est celle du Sanhédrin et des Grands Prêtres juifs, une vérité qui est dictée par la « Loi de Moïse ». Selon cette vérité des religieux juifs, Jésus a blasphémé contre Dieu, par son comportement, son enseignement, son non respect du Sabbat, et son opposition au fonctionnement religieux du Temple de Jérusalem. Et selon cette vérité du Sanhédrin, quiconque s’attaque au Temple de Jérusalem offense celui qu’il abrite en son sain, c’est-à-dire le Dieu des juifs, et quiconque offense ce dernier mérite la mort.

La deuxième vérité qui nous est présentée, est la vérité du gouvernement romain et de Ponce Pilate, une vérité dictée par la « Pax Romana ». Selon cette vérité romaine, quiconque trouble la paix publique s’en prend au pouvoir romain, donc à l’état romain, et offense son empereur César, et quiconque offense ce dernier mérite la mort.

Voilà donc deux vérités de l’époque de la vie de Jésus, l’une, vérité religieuse et juive, l’autre, vérité politique et romaine, dont la transgression de l’une ou de l’autre menait à une mort certaine. Mais Jésus ne se reconnaissait dans aucune de ces deux vérités.

Parce que Jésus, lui, nous annonce une autre vérité, une vérité divine et absolue qui dépasse toutes les vérités humaines. La vérité que Jésus défend, c’est la vérité de Dieu, qui lui est donnée par son Père, le SEIGNEUR, l’Eternel. Et de par l’existence de cette vérité de Dieu, il ne peut y avoir d’autre vérité absolue parmi les hommes. Car la seule vérité absolue ne peut être qu’en Dieu, une vérité qui est une, une vérité qui est Dieu lui-même.

Pour autant, cette vérité de Dieu peut-elle nous être révélée ? Oui, sûrement... la vérité de Dieu nous a déjà été révélée... par la mort et la résurrection de Jésus Christ. D’ailleurs, cet évènement est non seulement une révélation de la vérité de Dieu, mais il lui donne surtout une autorité absolue.

Par son essence divine, nous ne pouvons pas nous approcher de la vérité de Dieu, il ne nous est pas donné de la posséder et encore moins de tenter de l’imposer. Et surtout, nous ne pouvons pas prétendre la dicter à la place de Dieu lui-même. Alors que devons-nous faire, face à cette vérité de Dieu que nous sommes incapables de saisir ?

Heureusement, Jésus en s’adressant à Pilate, nous laisse de précieux indices ou plutôt pourrait-on dire, des consignes, sous la forme d’exhortations qu’il nous destine :

« Rendez témoignage à la vérité de Dieu ! »,

« Soyez dans la vérité de Dieu ! »,

« Ecoutez les paroles de Jésus Christ ! ».

A ces paroles d’exhortation, la vérité de Dieu nous impose : l’humilité mais aussi l’espérance, l’obéissance mais aussi l’enthousiasme, la contrainte mais aussi l’exaltation.

Cette vérité de Dieu ne se saisit pas, en effet, elle ne s’analyse pas, mais elle se vit ! Oui, nous devons la vivre pleinement, dans notre relation avec Dieu et dans l’amour de Jésus Christ. En effet, la vérité de Dieu est avant tout une vérité d’amour, à travers le Christ ressuscité. Jésus ne nous dit-il pas « Je suis le chemin, la vérité, et la vie » ? Assurément, cette vérité n’est autre que l’amour de Dieu, cette grâce que Dieu nous accorde gratuitement, dans sa grande bonté et sa miséricorde.

Finalement, quel mot dans la Bible, signifie « en vrai », « en vérité » et exprime à lui seul la pleine vérité de Dieu ? Le mot...

Amen.
Christophe